Guinea, Republic of: Interview with S.E. Dr. Cheick Taliby Sylla

S.E. Dr. Cheick Taliby Sylla

Ministre de l’Energie et de l’Hydraulique (Ministère de l’Energie et de l’Hydraulique)

2016-11-24
S.E. Dr. Cheick Taliby Sylla

Vous avez déclaré que la Guinée possède 75% du potentiel énergétique de la région de l’Afrique de l’Ouest et qu’elle est le « réservoir énergétique de la CEDEAO ». Pouvez-vous nous justifier ces déclarations ?

 

Très exactement, j’ai fait cette déclaration et ne l’ai pas faite au hasard. D’abord il faut rappeler que la Guinée est appelée « le château d’eau de l’Afrique Occidentale » parce que tous les fleuves importants de l’Afrique de l’Ouest prennent leur source dans notre Pays, par exemple le bassin du fleuve Niger prend sa source en Haute Guinée et traverse neuf Pays – entre autres la Guinée, le Mali, le Tchad… – avant de se jeter dans l’océan Atlantique. Sa décharge naturelle est au Nigéria. Ce qui fait de ce fleuve l’un des plus importants de l’Afrique, avec son potentiel hydrique très élevé. Cela a même fait l’objet d’une organisation de Bassin qui s’appel l’Autorité du Bassin du Niger (ABN), avec un secrétariat général exécutif basé au Niger. Les neuf Pays sont membres de cette organisation, il y a un conseil de ministres, et une conférence des chefs d’Etat pour mieux gérer ce fleuve commun qui prend sa source en République de Guinée. 

 

Avec le Bassin du Fouta Djallon, il y a également le fleuve Gambie et le fleuve Sénégal formés des rivières Bakoye et Bafing, qui se rencontrent sur le territoire Malien. Le fleuve Sénégal aussi a fait l’objet d’une organisation de Bassin qui s’appel l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal avec toutes ses potentialités énergétiques. Aujourd’hui sur le Fleuve Sénégal nous avons le barrage hydroélectrique de Manentali qui alimente le Mali, Sénégal et la Mauritanie ; il y a également le barrage Guyna qui va bientôt démarrer, puis Fellou qui lui a déjà démarré et fournit de l’énergie à ces trois pays (le Mali, Sénégal et la Mauritanie).

 

Au niveau du haut bassin du fleuve Sénégal qui se trouve en territoire guinéen, il y a trois barrages qui sont mis en place ; il y a Koukoutambar qui est très avancé, dont nous sommes à la phase de DAO mais à cause de l’environnement où nous venons d’inventorier plus de 5.000 chimpanzés qui sont rare de nos jours, l’étude environnementale est à revoir pour pouvoir les protéger. N’eût été ce souci, le projet serait déjà très avancé pour le démarrage des travaux. Il y a aussi Balassa et Boureya, l’ensemble des sites retenus au niveau du haut Bassin du fleuve ; il y a à peu près 700MW d’énergie que l’on pourrait produire et partager entre la Guinée, le Mali, le Sénégal et la Mauritanie. Pour ce faire, une ligne d’interconnexion doit quitter Koukoutambar, via Tougué pour Manentali et une autre ligne va quitter Koukoutambar pour Conakry. Tout cela afin de faciliter l’inter échange de l’énergie entre les différents pays. La même chose est prévue pour l’organisation du fleuve Gambie. 

 

Il faut savoir que le fleuve Konkouré sur lequel on a battit le barrage hydroélectrique de Kaléta n’est pas un fleuve transfrontalier mais il est important pour le système de production d’énergie et pour l’OMVG (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie) également. En effet, un barrage va être construit à la frontière entre la Guinée et le Sénégal – le barrage de Sambagalou – à partir duquel une ligne d’interconnexion de 1600KM va être construite pour pouvoir faire la boucle entre la Guinée, la Gambie, la Guinée Bissau et le Sénégal. Cette boucle permettra de dégager plus de 800MW d’énergie. Puis sur le fleuve Congo, du côté de la Guinée Bissau, il y a des possibilités de construire d’autres barrages qui vont rentrer dans le système interconnecté.

 

C’est pour ces raisons que nous affirmons à juste titre que les 75% des énergies distribuées se trouvent en République de Guinée. Par ailleurs il y a des réalisations sur le fleuve Niger ; il y a le barrage de Foumi dont la construction nous procura 90MW d’énergie et grâce auquel nous allons pouvoir irriguer cent mille hectares de terre sur le territoire Guinéen et plus encore sur le territoire Malien. Nous allons aussi pouvoir régulariser le lit du fleuve Niger qui est fortement ensablé aujourd’hui. Le sable va être transporté avec la régulation et la navigation va reprendre à partir de la Haute Guinée jusqu’à Bamako ; une navigation qui existait avant l’impact du dérèglement climatique dans nos différents pays. Nous allons aussi développer la pêche continentale dans de nombreuses zones pour atteindre des millions de tonnes de poissons au niveau de la Haute Guinée et pour le Mali. 

 

Il y a également le fleuve Mano. L’organisation Mano River est basée à Freetown. Elle réunit la Guinée, le Libéria, la Sierra Léone et la Côte d’Ivoire. Là aussi nous avons un potentiel important pour produire de l’électricité, et garantir l’agriculture qui assurera la sécurité alimentaire dans nos différents pays. Il est rare de rencontrer un pays qui a autant de frontières. En Guinée nous avons au Nord-Ouest la Guinée Bissau, au Nord le Sénégal, le Mali, à l’Est la Côte d’Ivoire, au Sud la Sierra Léone et le Libéria. 

 

Avec toutes les lignes d’interconnexions entre la Côte d’Ivoire, le Libéria, la Sierra Léone, la Guinée Bissau, la République de Guinée deviendra le réservoir énergétique de la CEDEAO. C’est un point de vu partagé par le Président de la Côte d’Ivoire qui l’a elle-même affirmé. Tous les chefs d’Etat sont conscients de cela, c’est pourquoi ils ont créé le West Africa Power Pool. C’est une institution permettant un système d’échange d’énergie entre les différents pays d’Afrique de l’Ouest. C’est sa direction qui gère et contribue fortement au développement énergétique des différents pays.

 

 

La principale priorité fixée par votre Ministère et le Professeur Alpha Condé concerne l’énergie en Guinée et de l’accès à l’électricité pour l’ensemble de la population. Quelles sont les principales mesures prises par votre Ministère pour favoriser l’accès à l’électricité en Guinée ? 

 

Nous avons pour mission de fournir de l’électricité non polluante, c'est-à-dire de l’énergie nouvelle renouvelable. Compte tenu du désir du président de la république de conformité de la Guinée avec les énergies nouvelles renouvelables, il a été désigné pour être le coordinateur de l’électrification de la CEDEAO. Certes tout le monde sait que les ressources viennent de la Guinée, mais la forte implication du président à la COP 21 à Paris où il a su convaincre sur l’importance d’électrifier l’Afrique à partir des énergies nouvelles renouvelables lui a permis d’obtenir ce rôle. L’Afrique ne contribue pas aux dérèglements climatiques mais elle en subit les conséquences aujourd’hui. De peur que l’Afrique ne contribue dans l’avenir aux dérèglements climatiques, il s’est engagé à faire valoir l’hydroélectricité et le solaire à travers des modules photovoltaïque. Cette défense lui a valu d’être choisi par tous les chefs d’Etats Africains comme champion de l’électrification, mais aussi comme coordinateur de l’électrification de toute l’Afrique à travers les énergies nouvelles renouvelables. 

 

Aujourd’hui plusieurs initiatives existent du côté Africain, il y a le SEA FOR ALL qui nous vient de l’ONU. Nous avons ratifié tous ces documents et nous savons exactement aujourd’hui quelles sont les contraintes du côté guinéen afin de respecter nos engagements pour l’électrification de la Guinée d’ici 2030. Nous nous sommes fixés comme objectif d’électrifier toute la Guinée d’ici 2020 et nous sommes engagés dans ce défi. Nous avons des solutions techniques, nous sommes à la recherche des financements qu’il faut pour atteindre cet objectif d’ici 2020.

 

 

La Guinée est également connue pour être le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest mais fait toujours face à un manque d’eau aussi bien à Conakry qu’à l’intérieur du pays. Quels sont les projets en cours pour donner accès à l’eau potable à l’ensemble de la population ?

 

La ville de Conakry a aujourd’hui d’énormes difficultés en matière d’eau. La Société des Eaux de Guinée (SEG) qui s’occupe de l’alimentation en eau potable de la ville de Conakry ainsi qu’aux centres urbains rencontre d’énormes difficultés pour alimenter les populations. Mais je vous rassure que là aussi des dispositions sont prises d’abord pour Conakry et ensuite pour l’intérieur du pays. 

 

Il y a un quatrième projet pour l’eau qui est déjà bien avancé. Un contrat a été signé et nous sommes maintenant fortement engagés dans la recherche des financements pour sa réalisation. En phase d’urgence on va produire 50.000M3 d’eau en augmentant tout simplement la vitesse de l’eau à partir de la prise des grandes chutes pour augmenter le débit à l’arrivé, là où les usines de traitements existent. Et nous allons encore mettre une station de traitement pour 50.000M3 d’eau pour améliorer très rapidement en seize mois l’alimentation de la ville de Conakry en eau potable. Il y a la phase intermédiaire qui va consister à récupérer 170.000M3 d’eau. 

 

Un autre endroit qui s’appelle Badibaki fournit une quantité d’eau énorme, qui, en période très critique, peu assurer l’alimentation de la ville de Conakry jusqu’à plus de 100 ans. Il suffirait tout simplement de construire des stations de traitement et de pompage, ainsi que des réservoirs pour la ville de Conakry afin de pouvoir correctement alimenter les populations. 

 

L’intérieur du pays n’est pas en reste. Aujourd’hui d’important travaux doivent être exécutés, par exemple le renforcement des capacités de production. L’urbanisation s’étend sur les périphériques, et le système moderne d’alimentation en eau potable se trouve au centre-même de la grande ville. Or aucune extension de réseau et ni augmentation des capacités de production dans ces différentes villes n’ont encore vu le jour. Nous sommes maintenant en phase de recherche des financements pour alimenter toutes ces villes. Il y a par ailleurs d’autres villes qui n’ont même pas de systèmes d’alimentation moderne en eau potable, là aussi il y a le projet des cinq villes. Nous allons doter ces cinq villes en système d’alimentation moderne en eau potable. Il restera trois autres villes pour lesquelles nous sommes en train de rechercher le financement pour faire des études de faisabilité.

 

Mais à Conakry il y a un projet d’accroissement de la production qui a permit aujourd’hui de réhabiliter la station de traitement d’eau qui date de 1964, et les travaux sont terminés. Nous avons également remplacé certaines parties des conduites datant de 1964 pour pouvoir permettre un écoulement gravitaire consistant afin de mieux alimenter les populations qui sont situées sur les hauteurs à peu prêt à 130 mètre d’altitude par rapport à la mer. Donc des actions concrètes ont été réalisées dans ce domaine. 

 

Il n’y a pas que l’hydraulique urbaine, il y a aussi le rural dont plus de 2.800 forages ont été réhabilités depuis que le prof. Alpha Condé est au pouvoir en Guinée. Au début, nous nous étions fixés pour objectif de réaliser à travers la Guinée 10.000 forages, mais cette fois-ci un peu plus modernes. Mais les forages à motricité humaine prennent assez de temps. En plus que ce soit dans les villages ou dans les champs, la corvée de transport d’eau – sur la tête des femmes et des petites filles – a un impact très négatif sur l’éducation des petites filles, parce que le temps de remplir un bidon de 20 litres et de le transporter jusqu’à la case familiale ne permet pas aux petites filles d’aller à l’école. C’est pourquoi nous nous sommes engagés à moderniser en utilisant les modules photovoltaïques avec un système de pompage et un réservoir parfois de 20,25 voir même de 30M3 de capacité et faire une mini addition qui peut rapprocher le point de puisage à la famille. Aussi, la maman aura plus de temps pour chercher des moyens afin de contribuer à la tenue du foyer. 

 

Au début, nous avions prévu de réaliser 10.000 forages, mais vu la pertinence et la rentabilité, le Président de la République a décidé d’aller jusqu’à 15.000 forages. Nous sommes déjà à 500 forages réalisés en Haute Guinée. Nous continuons à chercher des financements pour atteindre ces objectifs présidentiels. Le Président Alpha Condé tient vraiment à améliorer les conditions de vie des citoyens qui sont dans les zones urbaines et aussi ceux dans les zones rurales. Je peux dire aujourd’hui que les maladies hydriques, les maladies qui  sont liées à la potabilité de l’eau se raréfient beaucoup au niveau de nos villages. Dès qu’il y a un forage en panne la réaction est immédiate.

 

 

Après la construction du barrage de Kaléta, le barrage de Souapéti va également être financé en grande partie par la Chine qui est le partenaire commercial principal de la Guinée. Quelles actions prenez-vous afin d’attirer de nouveaux partenaires à l’international tant dans le secteur public que le secteur privé ? 

 

Ce que j’aimerais vous dire c’est que nous nous sommes pressés car avons perdu assez de temps dans le cadre du développement socio-économique de notre pays. Les portes du Ministère de l’énergie sont ouvertes à tous les investisseurs. C’est pourquoi la Guinée s’est dotée de lois facilitant l’investissement. Il y a une loi qui permet à quiconque de venir construire un barrage hydroélectrique en Guinée et vendre l’énergie à la société qui gère la clientèle (SEG, EDG). Quiconque veut construire une station d’épuration de traitement d’eau peu le faire et une convention d’achat d’eau peut être établit entre la Société des Eaux de Guinée et ce prometteur.

 

Il faudrait que les investisseurs s’intéressent à la Guinée. Il faut oser. Dans notre pays il n’y a pas de danger, nous n’avons jamais connu la guerre, mais plutôt une stabilité totale depuis notre indépendance. Tous les pays ont connu de petits soubresauts mais qui sont correctement gérés dans notre pays. Les portes de la démocratie sont ouvertes depuis que le président Alpha Condé est élu. Aujourd’hui nous avons la liberté d’expression, les radios s’expriment comme elles veulent, les journaux écrivent ce qu’ils veulent écrire. Les conditions se sont améliorées pour pouvoir accueillir des investissements étrangers.  La justice, des magistrats, une cour constitutionnelle et beaucoup d’autres institutions ont été mises en place pour qu’il y ait une véritable démocratie dans notre pays. 

 

Les investisseurs doivent saisir toutes ces opportunités qui leurs sont offertes, surtout au niveau de l’hydroélectricité qui couvre la CEDEAO. Ils pourront rentabiliser les moyens mis pour leurs éventuels investissements en Guinée dans les secteurs des mines, de l’agriculture, ou de l’énergie. Nous avons déjà des producteurs qui vendent de l’Energie à EDG (Electricité de Guinée) comme K énergie qui lui a vendu plus de 160.000KW. Il y a AON qui gère aujourd’hui 100MW des installations thermiques. Il y en a d’autres qui ont signés pour la réalisation des centrales solaires à travers la Guinée. Il y a donc des opportunités qui existent et il faut en profiter. 

 

 

Diplômé du prestigieux Institut Hydrotechnique de Moscou, vous avez ensuite bâti une riche carrière dans le secteur énergétique avec plus de 10 ans au sein de la Société des eaux de Guinée dont 5 en tant que Directeur, puis vous avez été en charge d’un des principaux projets de l’histoire de la Guinée réalisé en un temps record. Etant donné cette expérience, quelle empreinte souhaitez-vous maintenant laisser en Guinée à la suite de votre carrière ?

 

Le président de la République m’a honoré en me nommant commandeur de l’ordre national du mérite de mon pays le 29 Septembre 2015 après l’inauguration de Kaléta le 28 septembre et c’est pour moi un honneur extraordinaire. Chaque fois que je rentre à la maison et que je vois le médaillon, je n’arrive pas à être tranquille dans ma tête parce qu’il est facile d’avoir un mérite mais difficile de le garder surtout quand on exerce une autorité qui est liée aux populations. Tant que c’est bon, vous êtes applaudis, mais dès qu’il y a un petit dérapage, on oublie que c’était bon. 

 

Cela maintient ma conscience en état d’éveil et d’imagination pour faire progresser la mission qui m’a été confiée à savoir électrifier toute la Guinée et donner de l’eau à toute la population guinéenne. C’est un objectif très ambitieux, mais je pense qu’avec notre engagement volontariste et le soutient du président de la République, nous sommes sûrs et certains que nous atteindrons nos objectifs. Etre commandeur de l’ordre national me fait un grand plaisir, je ne voulais pas trop en parler mais on m’a fait savoir que c’est un mérite national qui ne doit pas être caché. C’est pourquoi dans mon bureau se trouve la copie du décret du président de la République ; le médaillon, lui, est dans ma chambre. C’est un plaisir pour moi que mes enfants le voient et soient fiers de leur papa. Cette fierté me donne davantage de force pour mériter la confiance que le président de la République a placé en moi.

 

V

 

ous avez déclaré que la Guinée possède 75% du potentiel énergétique de la région de l’Afrique de l’Ouest et qu’elle est le « réservoir énergétique de la CEDEAO ». Pouvez-vous nous justifier ces déclarations ?

Très exactement, j’ai fait cette déclaration et ne l’ai pas faite au hasard. D’abord il faut rappeler que la Guinée est appelée « le château d’eau de l’Afrique Occidentale » parce que tous les fleuves importants de l’Afrique de l’Ouest prennent leur source dans notre Pays, par exemple le bassin du fleuve Niger prend sa source en Haute Guinée et traverse neuf Pays – entre autres la Guinée, le Mali, le Tchad… – avant de se jeter dans l’océan Atlantique. Sa décharge naturelle est au Nigéria. Ce qui fait de ce fleuve l’un des plus importants de l’Afrique, avec son potentiel hydrique très élevé. Cela a même fait l’objet d’une organisation de Bassin qui s’appel l’Autorité du Bassin du Niger (ABN), avec un secrétariat général exécutif basé au Niger. Les neuf Pays sont membres de cette organisation, il y a un conseil de ministres, et une conférence des chefs d’Etat pour mieux gérer ce fleuve commun qui prend sa source en République de Guinée.

Avec le Bassin du Fouta Djallon, il y a également le fleuve Gambie et le fleuve Sénégal formés des rivières Bakoye et Bafing, qui se rencontrent sur le territoire Malien. Le fleuve Sénégal aussi a fait l’objet d’une organisation de Bassin qui s’appel l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal avec toutes ses potentialités énergétiques. Aujourd’hui sur le Fleuve Sénégal nous avons le barrage hydroélectrique de Manentali qui alimente le Mali, Sénégal et la Mauritanie ; il y a également le barrage Guyna qui va bientôt démarrer, puis Fellou qui lui a déjà démarré et fournit de l’énergie à ces trois pays (le Mali, Sénégal et la Mauritanie).

Au niveau du haut bassin du fleuve Sénégal qui se trouve en territoire guinéen, il y a trois barrages qui sont mis en place ; il y a Koukoutambar qui est très avancé, dont nous sommes à la phase de DAO mais à cause de l’environnement où nous venons d’inventorier plus de 5.000 chimpanzés qui sont rare de nos jours, l’étude environnementale est à revoir pour pouvoir les protéger. N’eût été ce souci, le projet serait déjà très avancé pour le démarrage des travaux. Il y a aussi Balassa et Boureya, l’ensemble des sites retenus au niveau du haut Bassin du fleuve ; il y a à peu près 700MW d’énergie que l’on pourrait produire et partager entre la Guinée, le Mali, le Sénégal et la Mauritanie. Pour ce faire, une ligne d’interconnexion doit quitter Koukoutambar, via Tougué pour Manentali et une autre ligne va quitter Koukoutambar pour Conakry. Tout cela afin de faciliter l’inter échange de l’énergie entre les différents pays. La même chose est prévue pour l’organisation du fleuve Gambie.

Il faut savoir que le fleuve Konkouré sur lequel on a battit le barrage hydroélectrique de Kaléta n’est pas un fleuve transfrontalier mais il est important pour le système de production d’énergie et pour l’OMVG (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie) également. En effet, un barrage va être construit à la frontière entre la Guinée et le Sénégal – le barrage de Sambagalou – à partir duquel une ligne d’interconnexion de 1600KM va être construite pour pouvoir faire la boucle entre la Guinée, la Gambie, la Guinée Bissau et le Sénégal. Cette boucle permettra de dégager plus de 800MW d’énergie. Puis sur le fleuve Congo, du côté de la Guinée Bissau, il y a des possibilités de construire d’autres barrages qui vont rentrer dans le système interconnecté.

C’est pour ces raisons que nous affirmons à juste titre que les 75% des énergies distribuées se trouvent en République de Guinée. Par ailleurs il y a des réalisations sur le fleuve Niger ; il y a le barrage de Foumi dont la construction nous procura 90MW d’énergie et grâce auquel nous allons pouvoir irriguer cent mille hectares de terre sur le territoire Guinéen et plus encore sur le territoire Malien. Nous allons aussi pouvoir régulariser le lit du fleuve Niger qui est fortement ensablé aujourd’hui. Le sable va être transporté avec la régulation et la navigation va reprendre à partir de la Haute Guinée jusqu’à Bamako ; une navigation qui existait avant l’impact du dérèglement climatique dans nos différents pays. Nous allons aussi développer la pêche continentale dans de nombreuses zones pour atteindre des millions de tonnes de poissons au niveau de la Haute Guinée et pour le Mali.

Il y a également le fleuve Mano. L’organisation Mano River est basée à Freetown. Elle réunit la Guinée, le Libéria, la Sierra Léone et la Côte d’Ivoire. Là aussi nous avons un potentiel important pour produire de l’électricité, et garantir l’agriculture qui assurera la sécurité alimentaire dans nos différents pays. Il est rare de rencontrer un pays qui a autant de frontières. En Guinée nous avons au Nord-Ouest la Guinée Bissau, au Nord le Sénégal, le Mali, à l’Est la Côte d’Ivoire, au Sud la Sierra Léone et le Libéria.

Avec toutes les lignes d’interconnexions entre la Côte d’Ivoire, le Libéria, la Sierra Léone, la Guinée Bissau, la République de Guinée deviendra le réservoir énergétique de la CEDEAO. C’est un point de vu partagé par le Président de la Côte d’Ivoire qui l’a elle-même affirmé. Tous les chefs d’Etat sont conscients de cela, c’est pourquoi ils ont créé le West Africa Power Pool. C’est une institution permettant un système d’échange d’énergie entre les différents pays d’Afrique de l’Ouest. C’est sa direction qui gère et contribue fortement au développement énergétique des différents pays.

 

La principale priorité fixée par votre Ministère et le Professeur Alpha Condé concerne l’énergie en Guinée et de l’accès à l’électricité pour l’ensemble de la population. Quelles sont les principales mesures prises par votre Ministère pour favoriser l’accès à l’électricité en Guinée ?

Nous avons pour mission de fournir de l’électricité non polluante, c'est-à-dire de l’énergie nouvelle renouvelable. Compte tenu du désir du président de la république de conformité de la Guinée avec les énergies nouvelles renouvelables, il a été désigné pour être le coordinateur de l’électrification de la CEDEAO. Certes tout le monde sait que les ressources viennent de la Guinée, mais la forte implication du président à la COP 21 à Paris où il a su convaincre sur l’importance d’électrifier l’Afrique à partir des énergies nouvelles renouvelables lui a permis d’obtenir ce rôle. L’Afrique ne contribue pas aux dérèglements climatiques mais elle en subit les conséquences aujourd’hui. De peur que l’Afrique ne contribue dans l’avenir aux dérèglements climatiques, il s’est engagé à faire valoir l’hydroélectricité et le solaire à travers des modules photovoltaïque. Cette défense lui a valu d’être choisi par tous les chefs d’Etats Africains comme champion de l’électrification, mais aussi comme coordinateur de l’électrification de toute l’Afrique à travers les énergies nouvelles renouvelables.

Aujourd’hui plusieurs initiatives existent du côté Africain, il y a le SEA FOR ALL qui nous vient de l’ONU. Nous avons ratifié tous ces documents et nous savons exactement aujourd’hui quelles sont les contraintes du côté guinéen afin de respecter nos engagements pour l’électrification de la Guinée d’ici 2030. Nous nous sommes fixés comme objectif d’électrifier toute la Guinée d’ici 2020 et nous sommes engagés dans ce défi. Nous avons des solutions techniques, nous sommes à la recherche des financements qu’il faut pour atteindre cet objectif d’ici 2020.

 

La Guinée est également connue pour être le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest mais fait toujours face à un manque d’eau aussi bien à Conakry qu’à l’intérieur du pays. Quels sont les projets en cours pour donner accès à l’eau potable à l’ensemble de la population ?

La ville de Conakry a aujourd’hui d’énormes difficultés en matière d’eau. La Société des Eaux de Guinée (SEG) qui s’occupe de l’alimentation en eau potable de la ville de Conakry ainsi qu’aux centres urbains rencontre d’énormes difficultés pour alimenter les populations. Mais je vous rassure que là aussi des dispositions sont prises d’abord pour Conakry et ensuite pour l’intérieur du pays.

Il y a un quatrième projet pour l’eau qui est déjà bien avancé. Un contrat a été signé et nous sommes maintenant fortement engagés dans la recherche des financements pour sa réalisation. En phase d’urgence on va produire 50.000M3 d’eau en augmentant tout simplement la vitesse de l’eau à partir de la prise des grandes chutes pour augmenter le débit à l’arrivé, là où les usines de traitements existent. Et nous allons encore mettre une station de traitement pour 50.000M3 d’eau pour améliorer très rapidement en seize mois l’alimentation de la ville de Conakry en eau potable. Il y a la phase intermédiaire qui va consister à récupérer 170.000M3 d’eau.

Un autre endroit qui s’appelle Badibaki fournit une quantité d’eau énorme, qui, en période très critique, peu assurer l’alimentation de la ville de Conakry jusqu’à plus de 100 ans. Il suffirait tout simplement de construire des stations de traitement et de pompage, ainsi que des réservoirs pour la ville de Conakry afin de pouvoir correctement alimenter les populations.

L’intérieur du pays n’est pas en reste. Aujourd’hui d’important travaux doivent être exécutés, par exemple le renforcement des capacités de production. L’urbanisation s’étend sur les périphériques, et le système moderne d’alimentation en eau potable se trouve au centre-même de la grande ville. Or aucune extension de réseau et ni augmentation des capacités de production dans ces différentes villes n’ont encore vu le jour. Nous sommes maintenant en phase de recherche des financements pour alimenter toutes ces villes. Il y a par ailleurs d’autres villes qui n’ont même pas de systèmes d’alimentation moderne en eau potable, là aussi il y a le projet des cinq villes. Nous allons doter ces cinq villes en système d’alimentation moderne en eau potable. Il restera trois autres villes pour lesquelles nous sommes en train de rechercher le financement pour faire des études de faisabilité.

Mais à Conakry il y a un projet d’accroissement de la production qui a permit aujourd’hui de réhabiliter la station de traitement d’eau qui date de 1964, et les travaux sont terminés. Nous avons également remplacé certaines parties des conduites datant de 1964 pour pouvoir permettre un écoulement gravitaire consistant afin de mieux alimenter les populations qui sont situées sur les hauteurs à peu prêt à 130 mètre d’altitude par rapport à la mer. Donc des actions concrètes ont été réalisées dans ce domaine.

Il n’y a pas que l’hydraulique urbaine, il y a aussi le rural dont plus de 2.800 forages ont été réhabilités depuis que le prof. Alpha Condé est au pouvoir en Guinée. Au début, nous nous étions fixés pour objectif de réaliser à travers la Guinée 10.000 forages, mais cette fois-ci un peu plus modernes. Mais les forages à motricité humaine prennent assez de temps. En plus que ce soit dans les villages ou dans les champs, la corvée de transport d’eau – sur la tête des femmes et des petites filles – a un impact très négatif sur l’éducation des petites filles, parce que le temps de remplir un bidon de 20 litres et de le transporter jusqu’à la case familiale ne permet pas aux petites filles d’aller à l’école. C’est pourquoi nous nous sommes engagés à moderniser en utilisant les modules photovoltaïques avec un système de pompage et un réservoir parfois de 20,25 voir même de 30M3 de capacité et faire une mini addition qui peut rapprocher le point de puisage à la famille. Aussi, la maman aura plus de temps pour chercher des moyens afin de contribuer à la tenue du foyer.

Au début, nous avions prévu de réaliser 10.000 forages, mais vu la pertinence et la rentabilité, le Président de la République a décidé d’aller jusqu’à 15.000 forages. Nous sommes déjà à 500 forages réalisés en Haute Guinée. Nous continuons à chercher des financements pour atteindre ces objectifs présidentiels. Le Président Alpha Condé tient vraiment à améliorer les conditions de vie des citoyens qui sont dans les zones urbaines et aussi ceux dans les zones rurales. Je peux dire aujourd’hui que les maladies hydriques, les maladies qui  sont liées à la potabilité de l’eau se raréfient beaucoup au niveau de nos villages. Dès qu’il y a un forage en panne la réaction est immédiate.

 

Après la construction du barrage de Kaléta, le barrage de Souapéti va également être financé en grande partie par la Chine qui est le partenaire commercial principal de la Guinée. Quelles actions prenez-vous afin d’attirer de nouveaux partenaires à l’international tant dans le secteur public que le secteur privé ?

Ce que j’aimerais vous dire c’est que nous nous sommes pressés car avons perdu assez de temps dans le cadre du développement socio-économique de notre pays. Les portes du Ministère de l’énergie sont ouvertes à tous les investisseurs. C’est pourquoi la Guinée s’est dotée de lois facilitant l’investissement. Il y a une loi qui permet à quiconque de venir construire un barrage hydroélectrique en Guinée et vendre l’énergie à la société qui gère la clientèle (SEG, EDG). Quiconque veut construire une station d’épuration de traitement d’eau peu le faire et une convention d’achat d’eau peut être établit entre la Société des Eaux de Guinée et ce prometteur.

Il faudrait que les investisseurs s’intéressent à la Guinée. Il faut oser. Dans notre pays il n’y a pas de danger, nous n’avons jamais connu la guerre, mais plutôt une stabilité totale depuis notre indépendance. Tous les pays ont connu de petits soubresauts mais qui sont correctement gérés dans notre pays. Les portes de la démocratie sont ouvertes depuis que le président Alpha Condé est élu. Aujourd’hui nous avons la liberté d’expression, les radios s’expriment comme elles veulent, les journaux écrivent ce qu’ils veulent écrire. Les conditions se sont améliorées pour pouvoir accueillir des investissements étrangers.  La justice, des magistrats, une cour constitutionnelle et beaucoup d’autres institutions ont été mises en place pour qu’il y ait une véritable démocratie dans notre pays.

Les investisseurs doivent saisir toutes ces opportunités qui leurs sont offertes, surtout au niveau de l’hydroélectricité qui couvre la CEDEAO. Ils pourront rentabiliser les moyens mis pour leurs éventuels investissements en Guinée dans les secteurs des mines, de l’agriculture, ou de l’énergie. Nous avons déjà des producteurs qui vendent de l’Energie à EDG (Electricité de Guinée) comme K énergie qui lui a vendu plus de 160.000KW. Il y a AON qui gère aujourd’hui 100MW des installations thermiques. Il y en a d’autres qui ont signés pour la réalisation des centrales solaires à travers la Guinée. Il y a donc des opportunités qui existent et il faut en profiter.

 

Diplômé du prestigieux Institut Hydrotechnique de Moscou, vous avez ensuite bâti une riche carrière dans le secteur énergétique avec plus de 10 ans au sein de la Société des eaux de Guinée dont 5 en tant que Directeur, puis vous avez été en charge d’un des principaux projets de l’histoire de la Guinée réalisé en un temps record. Etant donné cette expérience, quelle empreinte souhaitez-vous maintenant laisser en Guinée à la suite de votre carrière ?

Le président de la République m’a honoré en me nommant commandeur de l’ordre national du mérite de mon pays le 29 Septembre 2015 après l’inauguration de Kaléta le 28 septembre et c’est pour moi un honneur extraordinaire. Chaque fois que je rentre à la maison et que je vois le médaillon, je n’arrive pas à être tranquille dans ma tête parce qu’il est facile d’avoir un mérite mais difficile de le garder surtout quand on exerce une autorité qui est liée aux populations. Tant que c’est bon, vous êtes applaudis, mais dès qu’il y a un petit dérapage, on oublie que c’était bon.

Cela maintient ma conscience en état d’éveil et d’imagination pour faire progresser la mission qui m’a été confiée à savoir électrifier toute la Guinée et donner de l’eau à toute la population guinéenne. C’est un objectif très ambitieux, mais je pense qu’avec notre engagement volontariste et le soutient du président de la République, nous sommes sûrs et certains que nous atteindrons nos objectifs. Etre commandeur de l’ordre national me fait un grand plaisir, je ne voulais pas trop en parler mais on m’a fait savoir que c’est un mérite national qui ne doit pas être caché. C’est pourquoi dans mon bureau se trouve la copie du décret du président de la République ; le médaillon, lui, est dans ma chambre. C’est un plaisir pour moi que mes enfants le voient et soient fiers de leur papa. Cette fierté me donne davantage de force pour mériter la confiance que le président de la République a placé en moi.