Congo: Interview with M. Martial Mathieu KANI

M. Martial Mathieu KANI

Ministre (Ministère de l’Industrie Touristique et des Loisirs)

2011-02-14
M. Martial Mathieu KANI
Le ministère de l’Industrie Touristique et des Loisirs s’attèle à valoriser le patrimoine touristique de la République du Congo et à promouvoir cette destination sur la scène internationale. Le pays regorge de curiosités mais le manque d’infrastructures en limite la portée. La politique de diversification de l’économie repose sur le développement du tourisme et offre de nombreuses opportunités d’investissement.

« Le potentiel touristique du Congo est énorme, il reste à y mettre de l’intelligence et de trouver des investisseurs, des financements pour transformer ce potentiel. […]  Le tourisme est un secteur d’avenir. Nous lançons un appel à tous les investisseurs, qu’ils viennent participer à cette grande aventure, car toute aventure procure toujours satisfaction ». M. Martial Mathieu KANI, Ministre de l’Industrie Touristique et des Loisirs



Le ministère de l’Industrie Touristique et des Loisirs s’occupe des mettre en forme les orientations du Gouvernement dans les domaines du tourisme et des loisirs. Pouvez-vous nous présenter les tâches qui vous incombent au quotidien ?

Faisons tout d’abord état de l’espace dans lequel nous travaillons depuis un an et demi. L’industrie touristique participe  aujourd’hui à hauteur de 1,6% au PIB et l’objectif d’ici 6 ans et de dépassé les 10%. Cet immense travail représente la mise en place des bases d’une véritable industrie touristique, qui se décline en plusieurs axes de développement.

La première direction consiste à élaborer un cadre institutionnel adapté, en révisant la loi d’orientation sur le tourisme et en modernisant les instruments de gestion de l’activité touristique. La création d’un office de promotion du tourisme et d’une agence d’aménagement des espaces touristiques sur l’ensemble du territoire remplacera la Direction Générale de l’Industrie Touristique, limitée dans ses possibilités d’action.

Le deuxième axe concerne l’aménagement de sites touristiques. Nous avons répertorié 150 curiosités touristiques, se répartissant sur la Côté Atlantique, pour un tourisme balnéaire, le long du fleuve  Congo ou au sein de ces espaces dominés par le vert – savanes et forêts. « Etant entendu que ces investissements sont encore faibles, nous considérons que le Congo lui-même est un grand site touristique que l’on peut vendre en l’état ». La nature et les curiosités offrent un intérêt touristique en soi.

La troisième direction a trait aux réceptifs, c’est-à-dire l’hôtellerie et la restauration. « Nous faisons un effort pour maîtriser ce secteur et pour être aux normes de la qualité ».

La gestion des aires protégées représente une autre direction. Les principales d’entre elles sont aujourd’hui l’aire protégée de Conkouati, sur le littoral Atlantique à proximité de Pointe-Noire, le parc national d’Odzala, à l’Ouest et, à l’extrême Nord, la vallée de Ndoki. Ces espaces dépassant nos frontières, nous avons décidé de les mettre en régie, avec le concours de l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), pour créer un cadre de gestion commune de ces aires.

« Le potentiel touristique du Congo est énorme, il reste à y mettre de l’intelligence et de trouver des investisseurs, des financements pour transformer ce potentiel ». La mise en place de tous ces dispositifs et la mobilisation plus massive de touristes permettront de se libérer de certains handicaps actuels, comme tarif aérien élevé. C’est dans cette optique que le Congo participera cette année au FITUR 2011 (Foire Internationale du Tourisme), à Madrid, non plus en tant qu’observateur mais en tant qu’acteur. Il en sera fait de même à Paris et Lyon.



L’économie du pays est basée à près de 90% sur l’exploitation des ressources naturelles, dont le pétrole. Les richesses naturelles du pays donnent aussi l’opportunité à d’autres secteurs de pouvoir se développer à l’avenir. Quelle(s) stratégie(s) le Ministère a-t-il aujourd’hui adopté pour soutenir les initiatives et les investissements amenant une diversification des sources de revenus ?

La conscience de la nécessité de diversification des voies de richesses est acquise auprès du Gouvernement, d’où l’ambition affichée du Président SASSOU NGUESSO d’augmenter la contribution du tourisme dans le PIB d’1,6% à 10%. Reste la question de la recherche des acteurs, à laquelle, je vous en remercie, vous participez à travers votre projet. « Notre gros problème, aujourd’hui, est de trouver des investisseurs. Et pour se faire, je tenais à souligner le fait que le Congo est un havre de paix, un atout indispensable au développement du tourisme ».

Nous sommes aussi membre de l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), un organe de facilitation et d’assistance, avec laquelle nous avons élaboré un schéma Directeur du tourisme, d’où découle des plans d’actions et la budgétisation des programmes d’investissements.



Le Schéma Directeur du tourisme regroupe donc les stratégies de développement de l’industrie touristiques pour les années à venir. Sur quels partenaires vous appuyez-vous pour en assurer la réalisation ? Et quelles priorités ont été établies dans ce document cadre ?

Ce document comporte à vrai dire plusieurs schémas d’actions. Il nous permettra d’abord de découper le pays en zones d’intérêt touristiques. Nous avons évoqué l’élaboration d’un cadre institutionnel favorable au développement du secteur touristique. Dans ce cas, la prévalence de l’intérêt général plutôt que privé en matière foncière pour obtenir des espaces d’aménagement en est un exemple.

De plus, nous cherchons à identifier des tour-opérateurs avec lesquels nous pourrons collaborer à l’avenir. Cette étape est nécessaire à la promotion de notre destination, mais conditionnée par la sécurité des voyageurs et les perspectives de rentabilité. Nous sommes d’ailleurs déjà en contact avec certains acteurs majeurs du secteur.

La réalisation des stratégies de développement s’appuie évidemment aussi sur un réseau de partenaires locaux, réuni en un consortium, avec lequel nous travaillons en collaboration sur les questions de promotion et d’amélioration de l’offre. « Le secteur du tourisme est un secteur extrêmement sensible, qui demande une attention soutenue, beaucoup de rigueur car il est au service de la satisfaction du touriste », d’où le besoin d’être en bonne intelligence avec les acteurs privés.



La dernière décennie a été marquée par un essoufflement du tourisme de masse, considéré comme néfaste pour les populations et l’environnement. Avec son incroyable biodiversité et l’absence relative de hauts lieux touristiques, la République du Congo se présente comme une région idéale au développement des tourismes alternatifs. Comment le Gouvernement congolais a-t-il abordé cette entrée dans une phrase de tourisme plus responsable et durable, basé notamment sur la valorisation du patrimoine naturel ? Quelles actions favorisent le développement de ce nouveau tourisme ?

Je dirais que cette tendance s’impose de fait, elle nous est naturelle ; d’abord, parce que la jeunesse de ce secteur nous empêche d’avoir connu tout autre forme, et ensuite, notre inclinaison à la préservation des espaces naturelles épouse l’avènement du tourisme vert. « J’espère que ceux qui ont intérêt à ce que cette tendance courante prenne de l’ampleur et s’installe comprennent aussi la nécessité de nous aider », car l’identification de curiosités touristiques ne suffit pas, encore faut-il pouvoir y accéder. Nous avons besoin d’investir dans la construction d’infrastructures et dans les grands travaux, un secteur dans lequel les privés locaux ne sont que rarement prêts à s’engager. « Nous espérons aussi que les décideurs internationaux accompagnent le Congo dans cette vision et nous appuient dans ces investissements ».



Le succès des stratégies de développement touristiques dépend certes de la création d’une offre solide et de qualité, mais repose aussi sur la capacité à établir un flux touristique. Des pays comme la Thaïlande ou l’Inde ont récemment lancé des campagnes de promotion institutionnelle dans ce cadre. Comment le Gouvernement compte-t-il promouvoir la destination « République du Congo » auprès des pays émetteurs ?

Nous avons pour projet « l’ouverture des « centres d’information touristiques » dans les grandes métropoles susceptibles d’émettre les touristes », comme Madrid, Paris, New York ou Shanghai. « Nous avons conscience que le tourisme est une vente de la beauté et il faut donc mettre en place de grands programmes de marketing ».



Nos lecteurs portent aussi un intérêt aux personnalités que nous rencontrons pour la production de notre rapport. M. KANI, vous êtes Ministre de l’Industrie touristique et des Loisirs, deux secteurs appelés à connaître une importance croissante dans la contribution à l’économie du pays. Quel parcours vous a mené à cette fonction ?


Ma nomination à ce poste est purement politique. Je suis secrétaire général du parti du  Rassemblement pour la Démocratie et le Développement (RDD), et par notre rapprochement avec le Parti Congolais du Travail (PCT) (parti du Président, ndlr), le RDD prend part à la gestion des affaires du pays. J’ai étudié la psychologie à l’Université et  je ne pensais pas un jour exercer dans le domaine de l’industrie touristique et que j’utilise dans ces connaissances dans la gestion quotidienne du ministère. La satisfaction du touriste relève par exemple d’aspects tout à fait psychologiques.



Malgré toutes ses richesses, la République du Congo reste souvent peu connue sur la scène internationale. Pourtant, le territoire présente des atouts incomparables à qui souhaite contribuer à la vie socio-économique du pays. Ayant soulevé la nécessité d’un appel à l’investisseur étranger, quel message délivriez-vous à nos lecteurs pour les inciter à prendre part au développement de la République du Congo ?

Le Congo-Brazzaville est un pays en paix, caractérisé par une population accueillante et innombrables curiosités touristiques. Le pays aimerait bénéficier de l’attention des investisseurs du monde sur ce secteur à l’objectif ambitieux de contribuer à 10% du PIB d’ici six ans. «  Le tourisme est un secteur d’avenir. Nous lançons un appel à tous les investisseurs, qu’ils viennent participer à cette grande aventure, car toute aventure procure toujours satisfaction ». Notre charte d’investissement est suffisamment flexible pour laisser le terrain ouvert à l’avantage des investisseurs.