ALGERIA
la Nouvelle Generation


V.I.P. INTERVIEWS
Interview avec

MONSIEUR MOKHTAR CHAHBOUB
LE PRESIDENT DIRECTEUR GENERAL DE LA SNVI


Quels sont les chiffres les plus actualisés, tel que les ressources financières, le nombre d'employés et les marges que vous avez faites et activités que vous avez établies pour l'année 2001 ?

La SNVI est une entreprise qui a pour vocation la production de biens industriels de type camions, autocars et autobus, semi-remorques, porte-engins, cocottes à ciment et autres équipements spéciaux tractés ou portés.

Le site principal à Rouiba, sur 260 hectares, et un autre site à Tiaret, constituent les deux grands sites de production de l'entreprise. La SNVI a un important réseau de soutien technique dans tout le pays, composé de douze unités commerciales réparties à travers le territoire national et assurant la prise en charge du produit.

Pour réaliser ces produits, nous avons en amont une fonderie de fonte et d'aluminium d'une capacité nominale de 6.000 tonnes/an qui répond aux besoins des usines de SNVI, et réalise quelques opérations de sous-traitance tant nationale qu'à l'exportation. La fonderie emploie 800 personnes.

L'usine intégrée de production de camions, d'autocars et d'autobus est composée d'un centre d'estampage doté de pilons, fours et divers équipements d'estampage, d'un bâtiment de tôlerie et emboutissage réalisant les châssis, les cabines et les diverses pièces embouties de tôlerie, un centre d'usinage mécanique pour la production d'organes mécaniques et de deux centres de montage, un pour les camions et un autre pour les autobus. Les capacités de production sont de 4.000 véhicules/an, avec un taux d'intégration de plus de 50 %. Cette entité qui emploie aujourd'hui près de 4.000 personnes

En aval, deux carrosseries industrielles assurent l'équipement des camions porteurs ainsi que la production d'une large gamme de remorques, semi-remorques et porte-engins. Leurs capacités combinées permettent la réalisation jusqu'à 4000 carrosseries portées et 3000 carrosseries tractées par an.

En 2002, nous escomptons atteindre un chiffre d'affaires de l'ordre de 17 milliards de dinars (220 millions de USD). En 2001, il était de 12,6 milliards de dinars.

Nous avons un effectif, de 8.000 travailleurs, que nous comptons réduire durant l'année pour le porter à 7.400 ou 7.300 personnes, dans le cadre d'un processus de réduction des effectifs résultant d'un plan stratégique mis en œuvre depuis l'année 2001 déterminant une réduction d'environ 1.000 travailleurs.

Sur le marché algérien, la concurrence peut devenir de plus en plus rude. Comment SNVI se prépare-t- à cette concurrence et à la réalisation de ses perspectives de part de marché ?

Nous avons l'avantage d'être très compétitifs par nos rapports qualité-prix. La qualité a évolué d'une manière significative. Pour cette année et pour l'année prochaine, un carnet de commandes conforte nos objectifs de chiffre d'affaires.

Par contre, nous avons été confrontés, dans le cadre de l'accord d'association conclu entre mon pays et l'Union Européenne, à un démantèlement tarifaire qui devait réduire toutes les barrières douanières.

Une forme de protection a été mise en œuvre en février de l'année en cours, qui institue un " droit additionnel provisoire " ou DAP sur certaines positions tarifaires concernant nos produits. Cette taxe sera progressivement démantelée, pour être nulle au bout de 04 années. Cette période de répit sera mise à profit pour avancer significativement dans notre programme de mise à niveau, mais aussi pour conclure des accords de partenariats durables selon des formules variées en vue de consolider nos parts de marché et celle de nos partenaires, à travers des approches complémentaires visant à exploiter toutes les synergies potentielles existantes.

En ce qui concerne les investissements que vous voulez lancer dans l'immédiat, sur quels secteurs d'activité vont-ils se porter et envisagez-vous éventuellement une diversification de vos activités ?

Pour les trois années à venir, l'entreprise n'envisage pas le lancement de gros investissements, hormis ceux qui seront déterminés à travers des accords d'association. Les principaux produits concernés pourraient être les produits de carrosseries, les camions de haut de gamme et les autocars et autobus.

Nous nous désengagerons de certaines activités trop intégrées qui perturbent nos cycles de production. Le cas des boîtes de vitesse est très significatif. Dans le monde, il n'y a que deux ou trois grands constructeurs de ce produit. Un accord de partenariat a été conclu avec l'un des plus grands fabricants de boîtes de vitesse, visant à la constitution d'une SARL en joint-venture, dont l'objectif sera de monter certaines boîtes et d'en assurer économiquement l'intégration progressive.

La même approche est également appliquée pour les ponts avant et arrière que nous produisons. Un accord préparé de longue date est en voie de finalisation avec un producteur de renom. Ce qui sera le cas aussi pour d'autres organes.

SNVI, à travers des accords de partenariat, cherche à s'entourer de fabricants d'organes et d'équipements en drainant des investissements en Algérie.

Au niveau de la politique commerciale, vous orienterez-vous vers d'autres marchés. Pourriez-vous nous apporter des précisions à cet effet ?

Dans notre approche, nous privilégions trois grandes zones où notre pénétration remonte à plus de dix années: les pays du Maghreb où de nombreux types de véhicules de notre marques évoluent, les pays sub-sahariens, où là aussi nous avons réalisé quelques opérations d'exportation encore soutenues aujourd'hui, ainsi que les pays africains tels le Gabon, la Côte d'Ivoire, l'Afrique du Sud… et enfin les pays du Moyen-Orient.

Ces approches seront affinées entre nous et nos partenaires, avec lesquels nous escomptons conclure des accords d'association. Il y a quelques marchés ciblés où nos produits présentent un rapport qualité/prix intéressant ces pays. C'est ainsi que nous avons pu vendre des autobus au Sénégal. Un contrat est en cours d'exécution avec le Gabon pour 200 autobus.

Nous sommes consultés par de nombreux opérateurs de pays africains comme le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Nigeria pour des véhicules de transport de personnes ou de marchandises: nous avons récemment procédé à la livraison d'une première tranche de 50 autobus à un opérateur du Gabon. Nous sommes très actifs aussi au Moyen-Orient particulièrement où nous plaçons chaque année quelques centaines de camions de gamme haute.

Nos capacités étant limitées, nous n'avons pas la prétention d'engager des opérations de prospection d'envergure. Nous considérons que nous pouvons placer entre 15 et 20 % de notre production sur le marché de l'exportation, ce qui peut représenter 40 à 50 millions de USD annuellement. Sur les trois prochaines années, nous allons nous limiter à ce niveau pour atteindre par ailleurs notre objectif de consolidation de nos parts sur le marché intérieur.
Au niveau local, les besoins sont très importants. Ils vont s'accroître avec la relance économique qui est annoncée, notamment au travers de la loi-programme portant sur le développement durable. Nous commençons à en percevoir les premiers signes encourageants avec une évolution notable du rythme d'enregistrement de commandes.

Notre objectif est de maintenir 40 à 45 % de parts de marché pour les véhicules haut de gamme, durant les cinq prochaines années.

La SNVI est un des géants industriels de l'Algérie. Il apporte énormément d'opportunités aux constructeurs déjà mentionnés, mais à quel stade des négociations êtes-vous avec tel ou tel grand constructeur automobile ?

Nous poursuivons les longues discussions et établissons diverses approches de partenariat avec les plus grands constructeurs européens, notamment français et allemands pour les véhicules industriels motorisés, mais aussi pour les carrosseries qui drainent d'autres constructeurs espagnols et italiens.

Jusqu'à présent, les propositions sont limitées à la création d'entités de type sociétés mixtes ou de joint-ventures, ayant pour objectif de commencer par un processus de montage du produit de la gamme de ces constructeurs et l'intégration progressive de certains composants de leurs véhicules au niveau de nos sites qui deviendraient ainsi une plate-forme industrielle. Notre préoccupation est la préservation de maximum d'emplois en adéquation avec nos objectifs économiques.

Nous n'avons pas d'engagement franc. Certaines formules d'association peuvent rapidement déboucher sur des accords de montage et de commercialisation pour certains modèles de véhicules et d'autre part sur le maintien de la production de certains de nos produits qui bénéficieraient de mise à jour technologique.

Le partenaire stratégique n'est pas le mot d'ordre ?

C'est notre première formulation privilégiée mais qui n'exclut pas d'autres formules plus ciblées. (sur une gamme de produits, une technologie, une usine…). Les partenaires ne se sont pas présentés en nous disant: " Nous nous intéressons à la SNVI pour une prise de contrôle, ou une prise de participation dans le capital de toute l'entreprise ", les approches plus segmentées nous semblent plus réalistes et réalisables et nous y travaillons.

Une question un peu plus globale qui engage l'économie algérienne. En tant que PDG d'une des plus grandes sociétés algériennes et après les événements qu'a connu l'Algérie mais dont elle semble sortir, quelle confiance portez-vous sur le futur de votre pays ?

Nous avons des ressources naturelles essentielles: le pétrole et le gaz, le phosphate... les produits de la mer avec nos 1200 km de côte. Leur exploitation rationnelle et contrôlée dans le cadre des lois fondamentales sur la protection de l'environnement devrait permettre à notre pays d'accélérer d'autres chantiers d'avenir: les barrages, l'agriculture en zones désertiques et montagneuses… et de voir l'avenir, sur les 50 prochaines années, d'une manière relativement sereine.

Sur le plan politique, nous avons atteint un niveau de maturité qui nous a permis de jeter les bases d'une réelle démocratie, intégrant les différences régionales, bien que de réelles contraintes conjoncturelles persistent.

L'accord d'association avec l'Union Européenne signé en avril dernier pourrait nous ouvrir d'autres horizons, tant par ses retombées sur notre économie, que par l'accroissement des phénomènes, je considère que c'est le début de la fin. Je pense que nous allons vers un cheminement plus positif.

Quelle est votre satisfaction personnelle depuis que vous avez accédé au poste de PDG de la SNVI ?

Je suis à la SNVI depuis le 1er septembre 1973. J'ai évolué dans cette entreprise en tant qu'ingénieur et gravi les échelons selon le processus que je m'étais fixé depuis le départ, avec la chance peut-être d'aboutir. Après avoir été président directeur général depuis 1998, j'ai été reconduit en qualité de directeur général unique, après modification en 1999 des organes de gestion et de contrôle de SNVI: un directoire composé d'un directeur général unique et d'un conseil de surveillance au titre du contrôle de la société.

Lorsque j'ai pris cette entreprise, et ce n'est pas la faute de mes prédécesseurs, entendons-nous bien, elle était en situation très difficile. Elle avait une production et un stock de produits qu'elle n'arrivait pas à écouler sur le marché, du fait d'une crise qu'elle avait subi durant les années 94-95. Mon arrivée a coïncidé avec une reprise qui a permis d'écouler tous les stocks qui étaient disponibles au niveau de l'entreprise et qui se chiffraient à 1.500 produits, ce qui était énorme.

Ma plus grande satisfaction est de nous retrouver dans une position où nous avons un carnet de commandes très important que nous n'arrivons pas à satisfaire.

Une autre est de faire partie de la famille de la SNVI. Je ne me sens pas rejeté par le collectif des travailleurs, au contraire, j'évolue au sein des ateliers et je le fais assez souvent et je sens à chaque fois un bon accueil au niveau des usines de la société.

Un message final à confier à nos lecteurs ?

D'abord je remercie ceux qui auront eu la patience, la curiosité ou l'intérêt à lire cet interview et réitère toute ma disponibilité envers les professionnels, constructeurs, sous-traitants ou équipementiers à examiner toute forme de relation commerciale ou industrielle d'avenir. Les lecteurs intéressés par l'Algérie, par l'activité des véhicules industriels, doivent faire confiance aux entreprises comme la SNVI et à l'Algérie d'une manière générale.

Notre pays recèle d'importants gisements de coopération dans tous les domaines d'activité: par son climat, ses régions fertiles, ses montagnes, ses sites touristiques tant sur la frange nord que dans le Sahara… et son hospitalité.

Je m'adresse surtout aux lecteurs spécialisés évoluant dans le secteur mécanique d'une manière générale et dans le véhicule industriel en particulier pour leur dire que l'industrie algérienne est jeune, la demande est croissante et les coûts de transformation sont très attractifs: voilà déjà quelques indicateurs qui pourraient motiver des intérêts.

Je vous remercie.

  Read on  

© World INvestment NEws, 2002.
This is the electronic edition of the special country report on algeria published in Far Eastern Economic REVIEW.
November 28th, 2002 Issue. Developed by AgenciaE.Tv