ALGERIA
la Nouvelle Generation














Monsieur Toufik Zani

Interview avec

MONSIEUR ZANI
President du Groupe CERALG
Ma première question sera d’ordre général. Pourriez-vous nous présenter votre groupe et nous retracer son historique ?

Le groupe CERALG est né de groupes publics et privés pour constituer une société publique-privée, dont le but était de réaliser en commun une unité de production de modules de construction de polystyrène, ce qui permettrait à cette société nouvellement créée de réaliser 1.500 logements par an sous forme de sonars et de blocs en polystyrène.

Bien avant cette association, il y eut, dans un premier temps, un essai de prototype par agrément. Sans cet agrément aucune construction ne peut être validée en Algérie. L’association avait pris l’initiative de réaliser un prototype en R + 1 dans la zone de Zéralda. Les matériaux ont été importés d’Europe et la réalisation de ce prototype a été faite en 21 jours, un R + 1 divisé en quatre types d’appartements. Cette opération a été réalisée en la présence d’un huissier et en utilisant les matériaux que nous devions par la suite, produire en Algérie.

Le projet en lui-même laissait supposer quatre unités pour faire face à la demande nationale. Cela allait permettre de réaliser 6.000 logements/an dans ce système qui a été agréé par le CTC. Malheureusement, pour des raisons indépendantes des uns et des autres, ce projet est resté en maturation jusqu’à ces dernières semaines où nous avons décidé de le lancer, quelles que soient les conséquences ou les difficultés du moment.

Pour le partenaire privé, cela doit être une véritable réussite. Le partenaire public lui apportera une expérience accumulée depuis trente ans. Ce qui nous a poussé à lancer ce projet et à entamer les études pour une unité de production dans la zone industrielle de Koléa, qui démarrera dans trois mois.

En dehors de cela, CERALG a fait de la commercialisation de matériaux de construction, principalement de ciment. Il venait de l’Est du pays vers le Centre où il y avait une demande constante et permanente. Nous avons essayé d’enrayer la pénurie en y ajoutant nos importations propres de ciment et matériaux de construction.

En outre, CERALG est l’agent agrée de la société Lafarge pour plusieurs activités du groupe: les réfractaires, les aluminates de calcium, le ciment et le ciment blanc.

La politique de privatisation en Algérie, qui, je pense, arrive à maturité et verra le jour dans les prochaines semaines, nous intéressait. Ainsi, le projet de privatisation n’est pas une lubie, c’est une réalité. La volonté politique est là, elle existe ainsi que la nécessité économique. Il est impératif que nous puissions aller de l’avant et de réussir cette privatisation.

Non seulement, l’Algérie fait partie des pays émergents, mais elle présente aussi des potentialités uniques sur le Bassin méditerranéen. Dans le sens ou nous avons des richesses du sol et du sous-sol uniques dans la région, une population jeune (60 % de moins de 30 ans) et donc une force de travail considérable et des capacités avérées par rapport aux pays voisins.

Ce que nous devons rechercher, en dehors du groupe, ce n’est plus du partenariat, qui est plutôt pour les grosses affaires comme les hydrocarbures. Par exemple, pour relancer une unité de briqueterie, nous n’avons pas besoin d’étrangers. Nous avons plus besoin de neurones, de créer de la valeur ajoutée, de la richesse et surtout d’intégration technologique et économique

Nous aurions pu, depuis longtemps, comme beaucoup de pays asiatiques, nous investir dans la délocalisation d’unités de production. En Europe, dans le monde occidental, beaucoup de sociétés voient leurs activités s’arrêter aux confins des problèmes sociaux, de la pollution et de la concurrence. Nous aurions pu avoir la possibilité, avec certains pays européens, de délocaliser certaines activités, très coûteuses du fait du coût de l’énergie et de la main-d’œuvre, et de les réaliser en Algérie, tout en les réexportant et tout en gardant une partie bien sûr pour notre propre développement.

Jusqu’à preuve du contraire et jusqu’à aujourd’hui, aucune initiative de ce type n’a été possible. Bien souvent, nous sommes les dindons de la farce. Aujourd’hui, grâce à Internet et à d’autres moyens de communication, l’Algérien arrive à savoir et à connaître. Il est indispensable que l’Europe puisse nous apporter son aide mais qu’elle soit concrète, réelle, nous en avons besoin. « Je préfère que l’on m’apprenne à travailler, à pêcher que de me donner du poisson » comme aurait dit Mao Tsé Toung.

Que représente l’Algérie sur l’échiquier méditerranéen ? Je pense que notre pays a une place prépondérante. Nous le savons. Mais aussi, avons-nous les moyens et la volonté de le placer à ce niveau par rapport aux autres pays méditerranéens, je dis bien méditerranéens, l’Europe du sud et le Maghreb. Nous avons les moyens et la volonté, traduite par les décisions politiques prises ces dernières années, très douloureuses certes, car elles ont pris et apporté leur lot de difficultés et autres au niveau social. Les dirigeants algériens, qu’on le veuille ou non, ont eu le courage de progresser, peut-être dans la douleur, mais ils l’ont fait.

Il y a eu des événements tragiques que notre pays a traversés. Les partenaires étrangers n’ont pas voulu comprendre une situation qui avait basculé grâce à leur laxisme, leur facilité, donner ça et là, aux uns et aux autres. Je pense que je suis assez clair à ce sujet.

Les sociétés avec lesquelles nous avons travaillé même, en période difficile, il serait dommage pour elles, de ne pas avoir leur place dans l’économie algérienne, qu’elles ne profitent pas des possibilités qu’offrent notre pays.

Quelle a été la contribution de votre groupe au développement de ce secteur ces dernières années ?

Notre groupe, malgré toutes les pesanteurs, les incertitudes et les drames que notre pays a traversé, a su se tourner vers la recherche de moyens capables de résoudre l’équation croissance démographique et logements. La demande démesurée face á une offre rigide nécessitait l’apport de nouvelles technologies, de méthodes et de matériaux fiables et compétitifs. La problématique résidait à mes yeux dans les longs délais de réalisation des constructions que logiquement se répercutaient sur les coûts. Réduire les délais, c’est réduire les coûts par l’industrialisation de la construction.

C’est ainsi que notre projet fit sont chemin et a obtenu l’aval et l’agrément de toutes les administrations concernées.
Notre procédé a certainement permis une évolution des mentalités chez les constructeurs habitués aux méthodes traditionnelles de construction.

Quel apport escomptez-vous des sociétés étrangères ?

Elles peuvent apporter beaucoup, en permettant de vulgariser le produit du point de vue de l’explication mais aussi du point de vue de la mise en place. La facilité, sans qu’il faille demander à un ingénieur de s’occuper de ces produits, comme pour les plaques en plâtre ou d’autres produits, etc.

Ces sociétés peuvent nous rapporter énormément. Elles ont mis en place des systèmes de construction, des techniques, la gestion des projets. Nous avons besoin de tout cela. Nous avons les capacités, mais avons-nous les moyens dans le monde du bâtiment et des matériaux ?

Nous devons impérativement nous adosser à des grands groupes pour faire évoluer le bâtiment vers des normes tout ce qu’il y a de plus standard comme en Europe ou aux Etats-Unis. Je ne parle pas de bâtiments de luxe, mais de bâtiments de type administratifs ou autres.

Ces entreprises devront nous apporter leurs connaissances, leur savoir-faire, etc. On nous vend du produit dopé. Nous devons être vigilants. Nous sommes un pays jeune et nous avons besoin de pays un peu plus âgés, qui puissent nous aiguiller, nous apporter leur aide technique, technologique, leur expérience, pour faire un chemin ensemble dans le sens du développement de notre pays.

Si ces entreprises viennent pour prendre un marché, gagner de l’argent et partir, il n’y a pas de pérennité. En tant qu’entrepreneurs, citoyens, nous avons un rôle à jouer vis-à-vis de ces entreprises. Leur expliquer nos besoins, nos avantages et nos inconvénients mais d’une façon très saine, claire, vulgariser notre message vis-à-vis d’eux.

Qu’avez-vous à offrir aux partenaires qui seraient prêts à venir ?

Un pays en plein développement, ouvert à toutes possibilités de partenariat, qui est en mutation, disposé. On leur offre la disponibilité et, de surcroît, un marché interne et externe.

Le rôle de l’Algérie, dans les pays limitrophes et les pays africains est important. Notre voix a été de tout temps écoutée par l’Afrique, par nos voisins. Il n’est pas utopique de dire à nos partenaires: « donnons-nous la main et allons acquérir d’autres marchés, allons développer ensemble, mais développons chez nous d’abord , des activités dans tous les domaines: la construction, la pêche, l’agriculture, les services, etc. »

Comme vous avez dû le constater, les sociétés de services se développent en Algérie. On sent qu’il y a une évolution, une dynamique qui va du plus jeune algérien, de l’âge de 12 ans à 77 ans, sinon plus.

Il suffit que nos partenaires nous accompagnent dans les divers projets, les divers développements que nous aimerions finaliser et réaliser.

Quel est votre chiffre d’affaires ?

Le chiffre d’affaires de l’année dernière du groupe CERALG était, si mes souvenirs sont exacts, de 225 millions de dinars en matière de commercialisation.

Ce qui nous intéressait, ce n’était pas de faire du commercial. Ce n’était pas notre but. Mais surtout, développer un concept de construction.

Etre adossé à un groupe tel que Lafarge, suppose que nous sommes en contact permanent avec les différentes activités de ce groupe, par le biais des différentes filiales dont nous avons la responsabilité pour la commercialisation du produit en Algérie, mais aussi, cela suppose que nous soyons au fait des nouveaux matériaux et autres.

Néanmoins, le groupe CERALG compte faire démarrer sa première usine dans le cadre du logement en polystyrène. Dans un premier temps, nous fabriquerons la dalle en polystyrène, ce qui nous permettra de réaliser à peu près, 1.500 logements de 80 m²/unité.

De combien est l’effectif de votre groupe ?

Nous tournons à peu près autour de 45 personnes. Pour nous, c’est la qualité de l’effectif qui est important.

Et en ce qui concerne la concurrence ?

Il n’y a pas de concurrence dans les matériaux de construction, vu le marché très demandeur. Mais, nous nous préparons quand même à ce type d’événement. C’est pour cela que nous essayons de développer des produits à très forte rentabilité, telle que la dalle en polystyrène, agréée par le CTC.

Ce sont des produits qui seront commercialisés dans les prochains mois, mais nous comptons aussi développer d’autres activités, tel que l’importation de la matière première pour la fabrication du ciment.

Ce qui est important, c’est que cette entreprise n’ait pas de ligne de crédit, pas de facilités de caisse, pas de ligne d’escompte et pas de dettes.

En matière de réalisation, il y a plusieurs projets. Les études sont prêtes pour la fabrication du mortier, du ciment blanc et de béton, en dehors des unités d’ensachage pour les sachets de 5 kg, 10 kg, etc, ce qui permettra son utilisation pour les travaux domestiques.

Quel message final adressez-vous aux investisseurs ?

Je crois, qu’il est impératif, grâce à votre aide, à votre action, que l’image de l’Algérie, qu’elle soit économique, politique, sociale ou culturelle, puisse évoluer sensiblement et positivement telle que vous la connaissez. La réalité de ce paysage, de ce pays, de ce peuple qui est adorable, à fleur de peau et quel que soit le niveau de la personne que vous avez rencontrée. Vous serez toujours les bienvenus.

Nous ne devons pas être forcément algériens, pour dire, que dans ce pays il y a des potentialités. Il n’y a pas la guerre. On peut rencontrer des gens très évolués, très sages. Il y a un amalgame, un mixage merveilleux où l’intelligence des uns et des autres permettra l’émergence d’un nouveau type d’Algérien, et se sera grâce à votre action d’explication pédagogique de l’autre que cela pourra être possible.

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© World INvestment NEws, 2002.
This is the electronic edition of the special country report on algeria published in Far Eastern Economic REVIEW.
November 28th, 2002 Issue. Developed by AgenciaE.Tv